Pour faire suite à mon texte intitulé
« l’innovation, créatrice d’enjeux », j’aimerais prendre le temps
d’expliquer la notion de « responsabilité sociétale des entreprises »
(RSE).

La RSE a effectivement connu un essor
considérable, au fil des dernières décennies, et « vient aujourd’hui
bousculer le management des entreprises dans l’ensemble de ses missions, à tous
les échelons de son organisation et de façon pérenne, sinon définitive. »[ii]
Mais d’où provient la RSE au fait?
La genèse de la RSE débute au 18e
siècle. Pasquero (2005) relate l’historique des différents régimes de la RSE en
quatre étapes. Premièrement, de 1880 à 1920, le régime de marché qui vise à
contrer les prix abusifs en instaurant des lois antitrust. En second lieu, dans
les années 1930, apparait le modèle associatif dont le but est d’encadrer
l’économie par des autoréglementations sectorielles. C’est aussi à cette
période, plus spécifiquement en 1953, que la première définition inclusive du
concept de la RSE fait son apparition, dans le livre de Bowen, Social Responsibilities of the Businessman.
En troisième lieu arrive le régime sociétal, de 1960 à 1980, lequel oblige
l’amélioration de la qualité de vie des citoyens et des travailleurs, avec
l’aide d’agences de règlementation. Finalement, de 1980 à 2010, on voit
l’apparition du régime d’efficacité, qui « consista surtout à
dérèglementer les activités des entreprises et à favoriser un certain retour à
la liberté du marché. En relâchant l’emprise de l’État, ce régime eut ainsi
pour effet d’élargir le champ de la RSE volontaire des entreprises. »[iii]
Plusieurs définitions se succèdent tout au long
de ces différentes périodes, pour finalement en arriver à une représentation
plus contemporaine de la RSE. Celle que je retiens, même si je ne la connaissais
pas auparavant, est tirée de la norme ISO 26000 : « L’expression
responsabilité sociétale désigne la responsabilité d’une organisation vis-à-vis
des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur
l’environnement, se traduisant par un comportement éthique et transparent qui contribue
au développement durable, y compris à la santé et au bien-être de la société;
qui prend en compte les attentes des parties prenantes; qui respecte les lois
en vigueur tout en étant en cohérence avec les normes internationales de comportement;
et qui est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses
relations. »[iv]
La norme ISO 26000 détermine plusieurs grandes
composantes de la RSE. On y retrouve : la gouvernance de l’organisation;
les droits de l’homme; les relations et conditions de travail; l’environnement;
la loyauté des pratiques; les questions relatives aux consommateurs; et
l’implication auprès des communautés et contributions au développement local.
Ce que j’en comprends, c’est que ce concept de
la RSE représente le lien entre l’entreprise et son environnement. C’est ici
que le concept d’éthique prend tout son sens. Car, comme je le mentionnais
précédemment, l’entreprise est un acteur de la société. À ce titre,
l’organisation doit mettre l’éthique à l’avant-plan de ses décisions, de
manière à agir en toute bonne foi et en connaissance de cause, afin d’éliminer
le mauvais jugement et ne garder que le bon, car la loi à elle seule ne suffit
pas pour encadrer les actions. Ma compréhension rejoint celle de Pasquero, qui
explique que « L’entreprise est un acteur social qui ne peut prospérer que
si son comportement est profondément ancré dans les intérêts, mais aussi dans
les normes, les valeurs et les idéaux des sociétés où elle est présente. Les
concepts d’éthique des affaires, de responsabilité sociale et de gouvernance
sociétale sont étroitement imbriqués, car ils incarnent cette nécessité. »[v]
Par conséquent, j’ai aussi compris que le
développement durable est la pierre angulaire de l’éthique, car c’est le
développement durable qui permet à l’organisation d’être vivable, viable et
équitable avec son environnement (l’intégrité écologique), sa rentabilité (le
développement économique) de même qu’avec les aspects sociaux (le développement
social et humain). Ou simplement, « le développement durable est un
développement qui répond aux besoins des générations du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ».[vi]
En fin de compte, je comprends mieux l’importance
RSE et l’ampleur qu’elle ne cesse de prendre dans les organisations, mais j’ai
tout de même une critique concernant l’application de la norme ISO 26000.
Quoique bien construite, je trouve qu’elle est très axée sur les grandes
entreprises et qu’elle est par surcroit discriminatoire pour les petites et
moyennes entreprises. Pour obtenir la
certification ISO 26000, une organisation doit répondre aux questions centrales,
et les domaines d’action correspondants. Or, la complexité et les coûts
nécessaires pour répondre à toutes les questions centrales la mettent hors de
portée pour les petites entreprises et très difficile d’atteinte pour les
moyennes entreprises. Si j’avais une proposition à faire, ce serait de
permettre aux organisations, de plus petites tailles, d’obtenir une
certification selon des critères conçus en fonction de leur capacité, par
exemple en fonction de leur revenu net. Ceci aurait comme effet de promouvoir
la norme dans ces organisations et pourrait même aider à garder le dynamisme de
l’essor de la RSE.
C’est pour cette raison précise qu’il est difficile d’aborder le sujet d’une telle certification dans les petites entreprises. Si ces dernières avaient un levier pour expliquer la possibilité d’avoir une certification adaptée à la
taille de leurs organisations, je suis certain qu'il y aurait une plus grande
réceptivité de leurs parts!
© 2015 Simon-Pierre Marion tous droits réservés
[i] Ramboarisata,
“Contexte économique et socio-politique de l’entreprise - MBA8T21-5 - UQÀM.”
[ii] Pascal
Bello, Stratégie et RSE la rupture managériale (Paris: Dunod, 2014).
[iii] Turcotte and
Salmon, Responsabilité Sociale et Environnementale de L’entreprise.
[iv] Marie-France
Turcotte et al., Comprendre La Responsabilité Sociétale de L’entreprise et
Agir Sur Les Bases de La Norme ISO 26000 (Québec: Les Publications de L’IEFP,
2011), 26000.
[v] Jean
Pasquero, “Commentaire : Éthique des affaires, responsabilité sociale et
gouvernance sociétale : démêler l’écheveau,” Gestion 32, no. 1 (March 1,
2007): 112–16, doi:10.3917/riges.321.0112.
[vi] Gro Harlem
Brundtland, Notre avenir à tous (Genève: Commission mondiale sur l’environnement
et le développement, 1987).
Malheureusement, la dictature des actionnaire fait assez vite prendre le bord du fameux RSE. C'est ce qui fait que lorsqu'une compagnie annonce des mise-à-pieds ou de l'outsourcing de jobs aux Indes, l'action monte !! L'actionnaire n'en a rien à cirer de son impact sur la société. Le Capitalisme est malade.
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