Comme je le
mentionnais dans mon article « l’innovation n’est pas qu’une simple invention », il n’est pas nécessaire d’avoir un brevet pour innover.
Par contre, pour les
entreprises technologiques, le brevet constitue un outil important pour ses
opérations, car elle donne un droit, non pas d’exploitation, mais
d’interdiction d’exploitation par un tiers de l’invention brevetée, à partir
d’une certaine date et pour une durée limitée.
Pour démontrer
l’importance des brevets, un groupe de chercheurs, aux États-Unis, ont compilé
30 années de données sur les dépenses des organisations en recherche et
développement. Ils ont ensuite comparé
ces données avec les revenus des ventes de même que des produits mis en marché
et de l’habileté à produire d’autres brevets de qualité de l’organisation.
Les chercheurs ont
alors découvert un pattern : les compagnies qui avaient un gros budget en
recherche et développement, combiné à un bon historique d’exploitation de leur
innovation, ont connu du succès l’année suivante dans 70% du temps[i].
Évidemment, le
synchronisme pour breveter une invention est important, car si vous exposez
votre idée trop rapidement, vos concurrents pourraient concevoir d’autres
inventions meilleures que la vôtre et prendre votre part de marché!
Mais le
synchronisme, s’il est important, devient très épineux, car la mondialisation
des marchés apporte des complexités supplémentaires aux brevetages des
inventions.
- La première complexité est que les brevets doivent se faire dans chacun des pays ou États. Il existe tout de même maintenant une façon simplifiée de protéger rapidement ses inventions dans un peu plus de 180 pays (États) par le biais du système PCT (Patent Cooperation Treaty)[ii] qui fut mis en place par l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle). Il existe aussi un système pour les pays européens, l’OEB (Office européen des Brevets)[iii]. Mais, même dans ces deux cas, si l’invention est protégée symboliquement pendant une période de temps pour tous les pays membres, le résultat final est que le dépositaire doit enregistrer ses brevets dans chaque pays! Ce n’est pas une mince tâche.
- La deuxième
complexité est de nature juridique. Une
fois notre brevet enregistré dans chaque pays, il faut parallèlement faire des
procès dans tous les pays en cas de litige ou de contrefaçon. Aussi, il n’y a aucune garantie que les
jugements seront les mêmes d’un pays à l’autre…
- La troisième problématique est que le temps d’attente, le coût et la qualité des dépôts des brevets varient énormément d’un pays à l’autre. Plusieurs auteurs relatent cette problématique. En 2011, «Bruno van Pottelsberghe de la Potterie» a fait une étude comparative entre le Japon, les États-Unis et l’OEB (Europe)[iv]. Il a noté que la qualité des dépôts en Europe est très élevée, mais que le coût est beaucoup plus élevé qu’aux États-Unis, tandis que le Japon se retrouve entre les deux autant du côté des coûts que de la qualité. C’est aussi un constat similaire qui est fait dans l’article « Complexity and Path Dependence in Biotechnology Innovation Systems »[v] de monsieur Jorge Niosi.
Je crois que la
seule façon de résoudre cette problématique mondiale est de briser les
barrières territoriales et de fournir notre monde d’un véritable système
centralisé de gestion des brevets (qu’un organisme comme l’OMPI pourrait
gérer), valide également dans tous les pays participants et dotés d’une cour
internationale qui pourrait appliquer son jugement dans tous les pays!
Bon, j’admets que ma
pensée est utopique à court, moyen et long terme, puisqu’aucun pays ne voudra
se départir de son droit de jugement afin de protéger ses intérêts et les
intérêts des organisations qui permettent au pays de prospérer. J’ai tout de même le droit de rêver :)
Et vous, comment
pensez-vous que nous pourrions améliorer le système des brevets?
[i] Christopher Malloy,
Lauren Cohen, and Karl Diether, “Wall Street Doesn’t Understand Innovation,” Harvard
Business Review Magazine, December 2012,
http://hbr.org/2012/12/wall-street-doesnt-understand-innovation/ar/1.
[ii] OMPI, “PCT - Le système
international des brevets,” Organisation Mondiale de la Propriété
Intellectuelle, January 16, 2014, http://www.wipo.int/pct/fr/.
[iii] OEB, “Office Européen
Des Brevets,” OEB, January 16, 2014, http://www.epo.org/index_fr.html.
[iv] Bruno van
Pottelsberghe de la Potterie, “The Quality Factor in Patent Systems” (ECARES,
July 2010),
http://is.jrc.ec.europa.eu/pages/ISG/patents/documents/2010-027-VANPOTTESLBERGHE-qualityfactor.pdf.
[v] Jorge Niosi, “Complexity
and Path Dependence in Biotechnology Innovation Systems,” Industrial and
Corporate Change 20, no. 6, Oxford University Press (2011): 1795–1826.
Un des obstacles majeurs à l’internationalisation des brevets est la langue parlée dans chacun des pays, et dans certains pays ou régions, il y a plus d’une langue officielle, ce qui fait qu’en Europe par exemple, la description des brevets doit obligatoirement se faire dans plusieurs langues, ce qui ajoute des frais supplémentaire de traduction.
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